Laurent Drelincourt

(1625-1680)

 

Livre premier - Sonnet 27

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1                    Artifice étonnant, vaste témérité !
2                    Les mortels se sont fait des maisons vagabondes,     
3                    Et d’un trafic douteux cherchant l’utilité          
4                    Sur le fier élément traverse[nt] les deux mondes.     

5                    Un vaisseau jusqu’au ciel, par les flots, est porté,   
6                    Puis, tout-à-coup, il cède au caprice des ondes,  
7                    Et, jusques dans l’abîme étant précipité,       
8                    Il est comme englouti dans les vagues profondes. 

9                    Ah ! Si ardente soif d’acquérir des trésors,       
10                  Dangereux aux vivants, inutiles aux morts,       
11                  Fait quitter la patrie et braver la mort même.

12                  Chrétien, ne dois-tu pas, par des projets plus hauts,    
13                  Pour gagner les trésors de la gloire suprême
14                  Quitter les biens du siècle et braver tous les maux ?

 

Annotations de Drelincourt :

Ligne 2 :      Les anciens, ignorant la boussole, n’étaient que des enfants en la navigation.

Ligne 3 :      « La convoitise du gain a inventé les navires. », dit l’auteur du livre de la Sagesse.

Ligne 11 :     Anacharsis disait de ceux qui sont sur la mer qu’il n’y avait que l’épaisseur d’une planche entre eux et la mort, et il balançait [1] à les conter entre les vivants.

Ligne 14 :     « Avec quel travail et quelle peine ne mérite pas d’être acquis le repos qui ne finira jamais. » (Saint Augustin)

 

[1] peser ; ici peut-être au sens de : hésiter

 

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