Charles Babut

(1835-1916)

Une petite biographie

 

Charles Edouard Babut naît le 6 avril 1835 à Paris. Il est le sixième (et dernier) enfant [1] d’Edouard Babut (1787-1848) et d’Adélaïde Marie Caroline Monod, dite Adèle (1796-1876). Adèle est une fille de Jean Monod et la sœur aînée d’Adolphe Monod. Son mari Edouard est fils d’un banquier ayant fait faillite ; lui-même a travaillé pour la banque Barings à Londres, mais se voit obligé de démissionner en 1834.

Voici comment Gustave Monod, le frère d’Adèle, raconte ces faits :

« Dans le mois d’octobre 1830, je retournai à Paris avec maman. A cette époque avait déjà débuté la maladie dont Edouard Babut fut atteint et qui devait amener un si grand changement dans la vie d’Adèle. Cette maladie est l’ataxie locomotrice ou tabès, affection mortelle, mais qui ne tue le patient que graduellement, après plusieurs années de souffrances affreuses. En 1834, le mal avait pris un tel développement, qu’Edouard était hors d’état de continuer son travail. Il donna sa démission, et la maison Baring, en reconnaissance de ses excellents services, lui assura une pension de retraite. Il vint avec sa femme et ses trois enfants habiter la maison que nous occupions à cette époque, faubourg Saint-Martin : maman trouva moyen de les caser en partie chez elle et en partie chez Frédéric, qui demeurait au-dessus de nous. Lorsque Valdemar fonda en 1834 la pension, […] il proposa à Adèle de venir tenir son ménage. Elle accepta, mais […] cet arrangement fut de courte durée, et Adèle revint avec sa famille au faubourg Saint-Martin où elle accoucha le 6 avril 1835, de son dernier enfant, Charles, qui, vu l’état de santé de son père, n’était pas attendu. Cet enfant, qui semblait devoir être une charge dans la famille et qu’on a eu beaucoup de peine à élever (il fallut recourir à six nourrices successives avant de trouver celle qui lui convenait), est devenu un des membres les plus distingués de la famille. » [2]

La jeunesse de Charles est donc marquée par la santé déclinante de son père. Plus tard, Charles raconte que « pendant des heures, parfois pendant des journées, l’excès de la souffrance arrachait [à son père] des cris » [3]. En été 1835, la famille part en en Suisse, à Renan (canton de Berne), pour rejoindre Marie Monod et sa famille, dans l’espoir que l’air de la Suisse soit utile à Edouard. Marie et sa famille reviennent à Paris en automne, alors que les Babut restent en Suisse et y passent tout l’hiver.

Au printemps 1836, l’état d’Edouard s’aggravant, Adèle, sur le conseil des médecins, s’établit à Nérac (Lot et Garonne) où vit leur ami, le pasteur Jean-Jacques Hosemann (1805-1886). En octobre 1836, Adolphe ayant été nommé professeur à la Faculté de Montauban, les Babut s’installent près de lui.

En 1847, Adolphe accepte l’appel de l’Eglise réformée de Paris. Edouard Babut meurt à Montauban le 3 octobre 1848, à l’âge de cinquante-et-un ans. Par la suite, sa famille quitte Montauban et s’installe à Paris.

Charles est un bon élève ; il remporte plusieurs prix au Lycée Saint-Louis, et, au Concours des Lycées de Paris et de Versailles de 1853, le prix d’honneur en philosophie [4].

Il étudie la théologie à Strasbourg (1854-1855) et à Montauban (1855-1858).

En 1856, son frère aîné Henri, un évangéliste qui sert comme aumônier militaire pendant la guerre de Crimée, contracte le typhus et meurt à Sébastopol [5].

En 1858, Charles obtient son doctorat en théologie de la faculté de Montauban.

Il passe ensuite plusieurs années en Allemagne, puis part comme précepteur en Angleterre [6]

A son retour, en 1862, il est consacré pasteur et obtient la paroisse de Beaumont-lès-Valence (Drôme). C’est sa mère qui tient le ménage.

Dès 1865, il est affecté à Nîmes (Gard) ; il tiendra ce poste jusqu’à la fin de sa vie. Sa mère Adèle le suit et vit auprès de lui jusqu’à sa mort en 1876.

En 1868, Charles épouse à Francfort Hélène Bonnet (1840-1918), fille du pasteur Louis Bonnet (1805-1892), dont il aura dix enfants : Suzanne(-Bertha) (1869-1958), Henry(-Emile) (1871-1942), Adèle(-Hélène) (1872-1951), Marie(-Juliette) (1873-1960), Ernest(-Théodore) [7] (1875-1916), Marguerite(-Marie) (1876-1925), Charles(-Emile) (1877-1878), Amy (1878-1967), Jeanne(-Louisa) (1880-1944) et (Valentine-)Lucie (janvier 1882 - avril 1882).

En 1870, lorsque Edmond de Pressensé (1824-1891) transforme son Bulletin théologique en Revue théologique autonome, destinée à être l’étendard intellectuel du parti évangélique, Charles Babut fait partie du comité de rédaction [8].

Il est par ailleurs président de la Mission intérieure évangélique de 1871 à 1883 [9].

Charles est un pasteur influent dans le Midi ; c’est lui qui préside l’ouverture du synode de 1872, et, en 1879, il préside la commission permanente du synode évangélique officieux [10]. En 1881, il est modérateur du deuxième synode général officieux de l’ERF, qui se tient à Marseille [11].

Il donne des cours à la Faculté de théologie de Montauban et est appelé plusieurs fois comme professeur, mais il refuse à chaque fois cet appel pour se consacrer exclusivement au ministère pastoral.

En 1890, son oncle Gustave Monod peut dire de Charles : « Maintenant pasteur à Nîmes, il est considéré comme un des premiers prédicateurs évangéliques de France. A propos de la publication d’un volume de sermons de Charles, un critique l’a qualifié de Bourdaloue protestant. » [12]

En 1911, Charles est parmi les dignitaires qui inaugurent le Musée du désert à Anduze.

Quand survient la guerre, en 1914, elle n’épargne pas non plus les pasteurs. « Les échanges épistolaires entre Charles Babut et Ernst von Dryander, prédicateur de la Cour impériale, témoignent du fossé qui s’était brutalement creusé entre les amis de jadis. Le 4 août 1914, Babut l’invita à rédiger une déclaration commune affirmant le rejet de toute haine de l’ennemi du moment et exhortant à mener la guerre avec humanité ; Dryander repoussa cette offre, justifiant de surcroît l’invasion de la Belgique. » [13]

Charles ne verra pas la fin de cette guerre ; il meurt le 18 septembre 1916 à Nîmes, quelques mois après avoir perdu son fils Ernest, précisément au front belge.

A part plusieurs volumes de sermons, Babut a laissé plusieurs travaux théologiques, comme par exemple :

Le Dictionnaire du monde religieux dans la France contemporaine de Mayeur et Hilaire va jusqu’à dire que Babut était « probablement le plus grand et le plus méconnu des théologiens protestants français de la fin du XIXe siècle ».

Encore aujourd’hui, une rue à Nîmes porte son nom.

Sources :

 

[1] Les autres enfants sont : Louise (1824-1825), Marie(-Charlotte) (1826-1827), Marie(-Louise) (1827-1911), Henri (1829-1856) et Fanny (1830-1916).

[2] Gustave Monod, La famille Monod, p. 188s

[3] Souvenir d’une Belle journée. Notre centenaire de famille 1808-1908, imprimé comme manuscrit, p. 27

[4] Gustave Monod, La famille Monod, p. 189s

[5] Nous possédons une lettre d’Adolphe à son neveu Henri en date du 28 mars 1856. A cette date, Henri n’était déjà plus de ce monde ; il est mort le 23 mars.

[6] Dictionnaire du monde religieux. La notice biographique dans l’ouvrage Cent Ans, p. 109, ignore ces séjours à l’étranger mais note « Précepteur chez M. Edmond de Pressensé, de Gabriel Monod et de Tommy Fallot. »

[7] Ernest Babut, né le 23 mars 1875 à Nîmes, élève de l’ENS, agrégé d’histoire, membre de l’École française de Rome (1899-1900), professeur à la Faculté des Lettres de Montpellier, titulaire de la chaire d’Histoire du christianisme, tué par l’ennemi à Boesinghe (Belgique), le 28 février 1916. Sa femme Suzanne, née Planchon (1887-1978), abritera et sauvera plusieurs Juifs pendant la deuxième guerre mondiale.

[8] André Encrevé, Protestants français au milieu du XIX siècle, p. 685. En font également partie : Edmond de Pressensé lui-même, les professeurs de la faculté de Strasbourg Auguste Sabatier (réformé) et Frédéric Lichtenberger (luthérien), mais aussi Roger Hollard (pasteur à Paris), et deux professeurs de la faculté de Montauban, Charles Bois et François Bonifas.

[9] Notice biographique dans l’ouvrage Cent Ans, p. 109

[10] Dictionnaire du monde religieux

[11] Notice biographique dans l’ouvrage Cent Ans, p. 109

[12] Gustave Monod, La famille Monod, p. 190

[13] http://regardsprotestants.com/une-guerre-juste/

 

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